Quartier des créateurs

Le Cours Julien, d’hier à aujourd’hui

Carrefour culturel, Marseille est aussi une mosaïque de cent onze quartiers. Chacun possède son histoire, son atmosphère, ses traditions, ses aficionados. Le Cours Julien est l’un d’entre eux. Aujourd’hui reconnu comme le fief des créateurs et des trendsetters, ce quartier populaire a connu de multiples métamorphoses.

Un marché pittoresque

Dès 1860, le Cours Julien et la Plaine sont le « ventre » de Marseille. Le Cours est alors bordé d’entrepôts regorgeant de fruits et légumes, production des maraîchers locaux ou marchandises fraîchement débarquées sur le Vieux-Port : artichauts de Tunisie, oranges d’Algérie, tomates du Maroc, ananas et bananes d’Afrique noire… Le marché est un théâtre où règnent les "partisanes" (celles qui "répartissent"), marchandes au détail qui se sont préalablement fournies auprès des grossistes. Enfouies dans leurs châles superposés, ces commères au verbe vigoureux interpellent les passants et animent un spectacle haut en couleurs. A l’emplacement de l’actuel Espace Julien, la loge maçonnique Saint-Jean d’Écosse, renommée pour être au XVIIIème siècle l’un des temples les plus richement décorés au monde, a été remplacée par les halles maraîchères Omer Decugis. Autour, de nombreux bâtiments servent de mûrisseries à bananes…

© Les Halles Omer Décugis
39 Cours Julien 13006 Marseille en 1971
Archives Famille Décugis © L'Espace Julien au 39 Cours Julien 13006 Marseille dans les années 2000 Archives Espace Julien © Espace Julien 39 Cours Julien 13006 Marseille

Un épicentre culturel

Dans les années 1970, la Ville de Marseille, afin de désengorger le centre-ville, décide de regrouper toutes les activités de fruits et légumes sur un seul et même site, dans le quartier des Arnavaux… Cette relocalisation oriente le quartier vers une nouvelle destinée : il devient un lieu d’agrément où s’installent compagnies de théâtre, stylistes, galeristes, antiquaires et restaurateurs, une destination prisée par les chineurs, les amateurs d’art et les noctambules. A la même époque, les halles maraîchères Omer Decugis sont transformées en centre socio-culturel. L'Espace Julien naît en en 1984 du partage de la Maison Pour Tous Léo Lagrange en deux équipements distincts : l’un à vocation sociale, le Centre social Julien actuel, l’autre à vocation culturelle et musicale, l'Espace Julien. Depuis, sous l’impulsion de ses dirigeants, Patrice Angosto et Christian Arcamone, l’Espace Julien n’a cessé de jouer son rôle de locomotive, offrant au public les concerts des plus grands artistes français ou internationaux et drainant 50 000 spectateurs par an.

Un berceau du street art

Parallèlement, le « Cours Ju » s’affirmait comme l’un des quartiers les plus branchés de la ville : ses boutiques indé, ses bars de quartier, son marché bio en ont fait le fief des créateurs, des jeunes et des intellectuels. Berceau des nouvelles tendances, il est aussi devenu le terrain de jeu privilégié des street artistes : graffitis, fresques et interventions de tous genres y transforment les façades en un palimpseste géant, toujours réinventé, où l’on retrouve les signatures de C215, Rémy Uno, Mahn Kloix, LxOne, Russ, M^elleGee, Kitsa, Manyoly… Ici, la plupart des commerçants ont demandé à un street artist de revisiter leur devanture, tandis que l’association Juxtapoz propose régulièrement à un peintre d’intervenir sur un pan de mur situé à l’angle de la rue Crudère. D’abord underground et illégal, le street art est devenu un réel atout commercial et touristique, une composante forte de l’identité du quartier…